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Carnet de bord de Kanaky
25 décembre 2005

La Côte Oubliée

Dimanche 25 Décembre

_ PUTAIN !!!!!!
Tony, debout ! Il est presque 7 heure.

_ Hein, what !? Oh merde !

On appelle Terra-Incognita (T-I) et bon comme le pain ils reviennent sur leurs pas . Ouf, c’est tout juste le temps de faire les sacs et de s’habiller. GO !
Je comate tout le long du voyage sans même pouvoir apprécier le paysage de montagnes rouges et vertes. Les 4x4 stoppent à proximité de la rivière de St Joseph à quelques centaines de mètres de son embouchure. C’est l’emplacement de l’ancien camp de Kwétéo. On est une douzaine à descendre les bateaux et le ravitaillement. On confie un sac avec quelques affaires et de la nourriture à T-I afin qu’ils nous le ramènent à l’arrivée, dans quatre jours. Nous sommes sur le départ et il n’y a pas à chier, faut se lancer ! Les dix personnes nous accompagnant ont l’air de se connaître et nous plantent là comme deux loques encore saoules.

Ouloulou… Tranquillou ! On avance tout doux et on s’accorde une première halte petit déjeuner face à la mer, les pieds dans l’eau douce pleine de sardines. Un épervier serait le bien venu pour opérer une razzia.

Le canoë c’est génial, tu peux bourrer un paquet de bordel dans les différents caissons mais attention à l’étanchéité. De plus ces embarcations solitaire possèdent une petite voile fixée sur la proue qui avec un peu d‘entraînement se manœuvre par un judicieux jeu d‘orteils. C’est un vrai luxe de progresser sans fatigue tout en surfant les vagues du large. On débarque sur une grande plage couverte de coraux morts. C’est la côte nord du cap Tadu. Pas top pour poser une tente mais le soleil frôle l’horizon, on fera mieux demain. En attendant c’est franchement bon de squatter un endroit désert.
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            Tranquillou                      1er campement            Baignoire naturelle

Lundi 26 Décembre

On remballe et Renan tente un coup de pêche. Pris dans nos occupations nous en oublions de laisser un peu de nourriture. Ce n’est rien, il y a une petite cascade en vue. On s’y arrête pour une baignade et un repas succin puis on prend le large paisiblement. Merde on a encore oublié la bouffe !

On fait alors une nouvelle escale forcée sur une beach où quelques grands Tamanous s’élancent au-dessus de la mer. Les vagues viennent taquiner les branches à fleur de l’eau. Comme si l’arbre ricochait en déployant ces ramifications vers l‘est. La première cachette se fait sous un gros bloc de roche noire sans omettre de disposer de précieux indices. Ainsi à notre retour nous ne pourrons pas rater les vivres vitales. Nous nous trouvons dans la baie de Ouinné mais on n’a pas le temps d’entrer plus dans les terres. De toute façon on repassera à pied, casse pas la tête !

On dépasse ensuite la pointe de Wopoke. La côte est magnifique mais la houle d’une rare violence nous dissuade d’une quelconque approche. Renan qui ne peut pas s’empêcher de filmer et photographier à tour de bras ne prête pas suffisamment attention aux vagues sournoises. Et ce qui devait arriver arriva, aux alentours de Tu Bwere :

_Renan tu es trop près du platier, fait gaffe ! Renan !

Trop tard , les vagues déferlent alors qu’il tente de visser le bouchon du caisson central dans lequel il range son appareil numérique. L’enchaînement est fatal et le bateau se renverse, Renan pris de panique essaye de récupérer masque, tuba, palmes, et appareil tout en maintenant le canoë. Je ne peux pas l’aider, le mal est fait et ça serait prendre le risque d’en faire autant. Je m’arrête plus loin et attend l’arrivé du naufragé. Plus de peur que de mal dirons nous bien que la mer est emportée la partie buccale du tuba, les gants et grillé l’appareil photo. Petite pose biscuit pour reprendre des forces après tant d’émotions et un petit jaune pour le triste Renan. On décolle et nous dépassons très vite la pointe Do Konya. De là nous apercevons le fameux Porc-épic qui est l’objectif de la journée. Nous foulons la plage de la presque île à la tombée du jour. La manœuvre d’accostage n’est pas évidente lorsque de grosses vagues s’écrasent sur le platier nos canoës n’étant pas stable, on risque de chavirer à chaque instant comme l‘a expérimenté notre pauvre Renan cet après-midi. La prudence et l’étude de la houle sont de mise avant toute tentative. Il faut trouver la bonne passe. C’est un très bel endroit mais encore ce tapis de corail et beaucoup de vent.

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     L'apéro du réconfort                  Porc-épique                  1ère halte victuaille

Une petite ballade à la recherche d’un sol convenable et de beaux coquillages. Aucun site n’a retenu notre attention, on installe donc notre domicile un peu à l’abri du vent, caché par une bute de coraux. Renan débusque un nautile en bon état, le crevard c’est justement ce que je cherche !
La nuit tombe vite mais on a à balle de bois. Grosse flambée ! Encore une nuit sur un matelas de corail.

Mardi 27 Décembre

Vu la taille des vagues ce matin, on décide d’emprunter le chenal de la presque île mais celui-ci indiqué sur nos cartes est inexistant. On traîne les canoës vers la rive nord. Au passage on s’octroie un petit délire dans un trou d’eau croupie. De l’autre côté, on rencontre trois hommes, eux aussi en canoë, un peu plus vieux, ils connaissent le coin et c’est sûr cette plage de sable à l’abri du vent c’est-ce qu’il nous aurait fallu cette nuit.

Nouveau platier mais sans les vagues, j’ai la chance de voir ou plutôt de distinguer une petite tortue détaller devant moi. On se laisse guider par le vent constant sud sud-est et débarquons sur du sable noir près de la rivière Wamwara. On dépose de la victuaille et un couple de kanaks aillant établi un campement pour le week-end nous offre un ananas vraiment trop sucré, trop bon !

Un peu plus loin sur un semblant de récif, au beau milieu de la mer un bout de corail émerge ! C’est pour nous l’occasion rêvée d’un petit apéro. Un petit jaune perdu dans le bleu de l’océan pacifique sur un caillou de moins de 1m² ! Renan enchaîne les gaffes et s’éclate le genou sur le « bar » tranchant. Encore deux heures de rame avant d’échouer sur une petite île ( l’îlot Menyuru) où se dessinent des nids de tortues. C’est la saison, peut-être en verrons nous une. Paisiblement mais rapidement nous installons les hamacs et démarrons l’APERO ! Non !! Un petit feu bien sûr. Si on continu comme ça on auras plus rien à se mettre dans le gosier pour le 1er de l’an.
Plutôt plaisant d’être seul sur un banc de sable et quelques cocotiers

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       Renan au réveil                Tonio qui ronfle               La pêche miraculeuse

Mercredi 28

Le rendez-vous étant fixé à 15h30 sur le quai de St joseph, on s’octroie une grasse mat, un gros caca parmi les œufs de Pugin et un petit coup de pêche. Les dix personnes du départ nous ont rejoins. Pas trop causant, je leurs empreinte quelques feuilles à rouler et du coup je plonge le tabac en poche. Bien vu l’artiste !!

Pas même dix minutes dans l’eau que je pique un gros Dawa aussi long que ma machette. Renan est dégoûté et veut alors tenter sa chance. Nada ! Je sort ensuite une belle lanterne pour bien le faire rager. L’heure de partir arrive et nous bourrons tout notre bordel dans les bateaux pour quitter cet endroit non sans peine. La troupe est au complet sur la dernière ligne droite. T. I. nous attend avec le sac que nous leur avions confié. Génial !! On leur laisse de nouveau des affaires trop lourdes pour la marche tel que les innombrables coquillages ramassés ça et là, que l’on récupérera à notre retour sur Nouméa.

Quelques conseils glanés auprès du costaud gérant et nous rebroussons chemin en direction de Yaté. On a compté environ six jours de marche. On traverse successivement les tribus de Grand Borindi, St Joseph et St Jean-baptiste. Un peu avant la fin de la piste nous croisons le camping d’Antoine, dit Mister Bob ! Un petit coup de fil aux familles avant l’isolement des oubliés de la côte et notre nouvel ami nous propose bières, rouge et repas à l’œil. On passe la soirée avec Bob aux cheveux d’un blanc immaculé, assez cocasse sur la tête d’un kanak. Intéressants échanges sur nos modes de vie complètement différents. Il nous rabâche entre autre que la côte est très dangereuse, qu’il faut toujours garder un œil sur les vagues déferlantes, que le meilleur moyen de traverser une rivière est de nouer des cocos ensemble, de se les passer sous les bras et jambes puis de nager ainsi jusqu’à l’autre rive, le sac sur le dos ! Ne pas faire les kayafous car les sols sont glissants et l’absence de récif rend la houle violente !!!!!!!! Il nous souhaite alors bonne chance et bon courage pour cette rando qui s’annonce scabreuse et mortelle !? On pose la tente sous le faré et veillons avec Mr Bob.

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           St joseph                   Chauffe-eau de Mr Bob             tortue caouanne

Une bonne douche chaude grâce au système chauffe-eau coco, une bien belle tortue pêchée par un neveu d’Antoine.

Jeudi 29

Au petit matin, 10h, nous partons sous la bienveillance du maître des lieux et attaquons le périple par la plage. 1h dans le sable pour échauffer les muscles et la première embouchure de la rivière Xwé Bwi se présente en obstacle. D’une largeur n’excédant pas 2m, cette première étape se passe sans dommage. Et de nouveau la plage d’un sable noir cuivré. L’épreuve était en fait facile car après la beauté du bord de mer de l’île Muru qui nous plonge dans le bain avec tamanous et pandanus en pagaille ainsi que les cocotiers jonchant la dizaine de mètres que la mer cède au sable ; ça se complique. Renan part en éclaireur. Le courant est violent, l’eau arrive au nombril. On s’en sort en une demi-heure sur un rivage identique au précédent. Puis c’est la traversée d’un platier de l’eau aux genoux. Dans la petite crique suivante un groupe d’hommes pêche des crabes de palétuvier et nous indique le sentier de la tribu de Petit Borindi en bout de piste juste avant la N’goi. Le village se dévoile enfin sous les arbres entre vieux araucarias et tamanous. Nous découvrons tout un système d’allées et de petites passerelles pour enjamber les ruisseaux en nombre. Quelques statues religieuses ornées de manous sacrent les lieux. On croise le chef et nous confortant aux coutumes lui demandons à continuer notre chemin à travers ses terres. C’est OUI bien sûr !

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     Traversée de rivière                  bâteau stop                     Bivouac N'goi

Mais la piste n’en fini pas. On atteint en ancien wharf sur la pointe Méngoi puis traversons une aire de stockage de minerai. Un bout de forêt et nous tombons dans la vase et pousses de mangrove, la marée à l’air haute et le guide vert nous conseille de sortir le bateau gonflable. On pense déjà aux astuces de Mr Bob et à la recherche de cocos. Avec les bouées que nous trimbalons on devrait sans tirer. LE gros problème est l’étanchéité des bagages et du matériel électronique qu’ils contiennent. La question ne se pose pas longtemps, deux enfants jouant à proximité sur une plate se proposent de nous transporter. Donc la chance nous sourit et nous voilà en bateau stop ! Et on se pose juste là ! Sur la plage abandonnée...
Fin de la journée qui annonce des lendemains très prometteurs. On pose le bivouac en abord de la pointe sableuse de la N’goi, rive sud. Les jeunes nous rapportent quelques poissons qu’ils ont eux à l’épervier. De quoi changer des sardines en boite ou pâtes chinoise. Une grande partie de l’après-midi restant devant nous, nous travaillons quelques branches de cocotier afin de confectionner un paravent. La sieste et un coup de pêche vont de soi.

Vendredi 30

Nous abordons la plage en longeant les tamanous de bord de mer plus communément appelé Calophyllum inophyllum car il n’y a plus de sentier ! Nous évoluons en fait parmi les roches parfois branlantes, souvent glissantes qui ne permettent aucun faut pas. Ce n’est pas l’endroit rêvé pour se tordre une cheville par exemple, la côte oubliée porte admirablement son nom. Un mur face à la mer, nous approchons la pointe Mépébu. Une importante falaise qu’il faut obligatoirement passer à marée basse. Oui le principal élément qui oriente notre avancée c’est bien sûr les horaires des marées.

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        les falaises noires              plage de sable                       plage de roche

Après cela autant de cailloux pour ralentir notre marche jusqu’à la rivière Taakwé qui offre de belles cascades un peu en amont. Profitons-en pour une bonne toilette et une petite visite avant de rendosser nos coquilles (en référence aux escargots). Les plages se succèdent ensuite sur un littoral bordé de sable noir, de chrome, de fer, de rochers et de corail mort. Et de nouveau une falaise abrupte ! Nous débouchons alors sur une petite creek. Celle-là même où nous avions découvert le refuge de robinson, là également que nous avions caché l’une de nos provisions. Je vais donc chercher parmi les toiles d’araignées le sac plastique enfouit dans le creux d’un banian. Fin content de retrouver le tout en l’état, on s’octroie une pause chocos. La journée touche à sa fin lorsque un petit court d’eau nous fit signe d’installer le camp. Un petit coin propre pour la tente, un petit espace pour le feu protégé du vent par un mur en branches de cocotiers bricolé par des amateurs. Le coup de pêche journalier qui détermine notre régime alimentaire. Poisson au riz coco ou sardines en boite. Bienheureusement, l’apéro ne rate pas une soirée mais la bouteille de pastis est déjà moitié vide. Demain donc ce sera pastis et rhum coco pour un nouvel an de toute beauté.

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   Campement de fortune            Shell compagnie             Tortue échouée, sèchée


Shell nautilus

Samedi 31

Le relief s’estompe pour laisser place à une grande plaine alluvionnaire couverte de joncs et de grands niaoulis. Une très longue plage de sable noir s’étend à perte de vue et parait interminable. La marche dans ce sable mou est un vrai supplice, les mollets chauffent et le soleil ne facilite pas l’affaire. Nous tombons nez à nez avec les restes d’une tortue. Quelle n’est pas notre surprise en découvrant son squelette. On récupère des morceaux de ce qui était une carapace et nous lui tirons la révérence. Près de trois kilomètres à vous coupez les pattes et l’embouchure de la Ni déchire la côte. Le passage des deux premiers îlots se fait haut la main mais le gros chenal final est profond et le courant violent. C’est pas gagné ! Bien entendu, la chance nous sourit à nouveau et trois chasseurs passant dans le coin nous invitent à bord de leur barge après quelques échanges sur l’étonnement de chacun à se rencontrer ici. Les chiens dont la peau sur les os me font mal au cœur peinent pour franchir les vagues de contre courant. Merci et bonne chasse !

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     L'interminable plage                Bâteau stop 2                 On n'est pas rendu !

On se donne pour objectif d’atteindre la rivière où quelques jours auparavant un couple kanak nous à offert un fort bon ananas. Ce sera le lieu de débauche d’un premier de l’an anthologique. Les plages et falaises se succèdent, le petit bout de chemin restant nous parait de plus en plus long. L'appel de l'apéro nous rend impatient, la mer commence à être bien haute et le désespoir s'installe lorsque que soudain au détour d'un bloc rocheux surgit la presque île de Porc-épique. Quel soulagement ! Renan à l'esprit faible n'a pas tenu le coup et la folie le submerge. Le voilà qui se prend pour Robinson. On se confectionne un bivouac du tonnerre avec ballons et déco de circonstance.

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     Falaise et Porc-épic                Bivouac 1er an                     Renan sieste

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      Traversée rivière                     Drink coco                     Panorama récif

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      Panorama - Ouinné                 Enfin de l'eau                  Camion de mine

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       Mines de Ouinné                      Bord de mer                     Choursins

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              Bivouac                       Fabrication rado                 Radeau de compète

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   Radeau après traversée         Baignoire naturelle                   Tricot raillé

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  Fin de la côte oubliée

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